Dans le cadre du Choix Goncourt de la Suède 2024, Annalena Sund Aillet, Nils Möllerberg et Sofie Linder livrent une critique littéraire de Humus de Gaspard Koenig, basée sur les débats du jury.
La situation environnementale de notre monde est le thème central du livre Humus écrit par Gaspar Kœnig, écrivain, philosophe et homme politique. Au centre de l’histoire se trouve la terre et surtout les vers de terre qui y vivent. L’ouvrage constitue une éco-critique de notre société actuelle, notamment de l’agro-industrie, de l’agriculture droguée et de l’utilisation d’engrais chimiques appauvrissant la terre. L’œuvre met également en lumière le phénomène de l’écoblanchiment et de l’activisme écologique.
L’histoire s’articule autour de deux amis, Arthur et Kevin, qui se rencontrent pendant leurs études d’agronomie – après le déménagement des étudiants du Château de Grignon en autarcie, avec 300 hectares de champs et forêts – dans le désert bétonné de Saclay avec seulement quelques mètres carrés de nature sauvage. Ces deux amis ont de grands idéaux, mais leurs chemins se séparent. Arthur, désireux de trouver un moyen de vivre en harmonie avec la nature, s’installe dans une ferme familiale à la campagne où ses idéaux se transforment de plus en plus en activisme. Kevin, quant à lui, a l’idée d’utiliser des vers de terre pour résoudre le problème des déchets d’une manière respectueuse de l’environnement. Son idée sera bientôt exploitée au centre d’une grande entreprise en démarrage.
Le jury du Choix Goncourt de la Suède a trouvé le thème du livre passionnant, important et contemporain. À travers le parcours des deux amis, l’auteur réussit à montrer différents aspects des questions liées à l’environnement. Il parvient également à opposer la vie d’Arthur à la campagne aux escapades de Kevin dans le monde de la finance. L’auteur donne de la crédibilité au livre en utilisant d’autres oppositions pour créer des angles intéressants : les jeunes contre les vieux, les pauvres contre les riches, la campagne contre la ville. Un autre thème à travers l’histoire est la sexualité des personnages, où la pansexualité de Kevin est en contraste avec celle de sa collègue qui utilise le sexe comme outil de pouvoir.
Dans son style réaliste, l’auteur utilise des descriptions longues et précises qui fonctionnent très bien pour la nature et la mise en place des personnages, mais selon une partie du jury, moins bien pour les personnages. Kevin et Arthur sont placés dans une forme fixe pour jouer leur rôle dans l’histoire et leurs personnalités ne sont pas développées au cours de l’histoire mais restent un peu plates, voire stéréotypées. Il en va de même pour les personnages secondaires, surtout les femmes.
Cependant, la construction du livre est intelligente. Tout au long du livre, les différentes évolutions de la vie de Kevin et d’Arthur se reflètent l’une dans l’autre, ce qui est un moyen efficace de mettre en évidence les dilemmes et de faire réfléchir le lecteur. Le fait que l’auteur soit également philosophe se voit dans la manière dont les questions sont soulevées. Ceci contribue à former un terrain fertile à la fin apocalyptique de l’histoire.
En conclusion, Humus capture l’angoisse environnementale de notre génération et finalement c’est le message éco-critique du livre qui est plus important que la psychologie des personnages. Pour le lecteur qui veut en savoir plus sur les vers de terre et l’avenir de notre planète, Humus est une œuvre indispensable.
Découvrez le mois prochain, la critique de Sarah, Susanne et l’écrivain d’Eric Reinhardt.
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